Chapitre II : La responsabilité contractuelle du banquier


Il existe deux régimes de
responsabilité civile : celui de la responsabilité délictuelle et celui
de la responsabilité contractuelle.
La responsabilité contractuelle suppose la violation par le débiteur
d’une obligation issue d’un contrat valable .Le débiteur qui n’exécute
pas son obligation ou qui l’exécute mal engage sa responsabilité
contractuelle .En ce cas, le juge doit déterminer avec précision le
contenu des obligations souscrites par les parties .Le dommage doit
être la conséquence directe de l’inexécution du contrat.
L’auteur de la faute contractuelle est, d’évidence, le cocontractant ;
débiteur de l’obligation inexécutée ou encore exécutée en retard. Mais
elle est aussi celle de tout tiers que le débiteur a introduit dans
l’exécution du contrat.
La responsabilité contractuelle du banquier naît des rapports directs
liant le banquier à ses clients .Ainsi le banquier voit sa
responsabilité engagée lorsqu’il manque totalement ou partiellement à
ses obligations contractuelles, notamment en exécutant incorrectement
les ordres reçus de son client .
Dans ce chapitre nous allons essayer de traiter deux des principaux
contrats qui lient le banquier à ses clients à savoir le contrat de
mandat et le contrat de crédit.


Section I : le contrat de mandat


L’article 879 du DOC stipule que : «
le mandat est un contrat par lequel une personne charge une autre
d’accomplir un acte licite pour le compte du commettant. Le mandat peut
être donné aussi dans l’intérêt du mandant et du mandataire, ou dans
celui du mandant et d’un tiers, et même exclusivement dans l’intérêt
d’un tiers ».
Tant que le mandataire agit dans les limites du mandat qui lui a été
octroyé par le mandant, il ne peut voir sa responsabilité engagée.
L’article 928 du DOC prévoit que « le mandataire qui agi sans mandat ou
au-delà de son mandat est tenu des dommages envers les tiers avec
lesquels il a contracté , si le contrat ne peut être exécuté (…) .De
même que l’article 903 du DOC précise que « le mandataire est tenu
d’apporter à la gestion dont il est chargé la diligence d’un home
attentif et scrupuleuses , et il répond du dommage causé au mandat par
le défaut de cette diligence , tel que l’inexécution volontaire de son
mandat ou des instructions spéciales qu’il a reçus , ou l’omission de
ce qui est d’usage dans les affaires » .Examinons plus attentivement ce
devoir de diligence dans les deux paragraphes qui suivent.
Paragraphe 1 : Principe légal : devoir de diligence.
Le devoir principal du banquier entant que mandataire est consacré par l’article 903 du DOC.
La diligence requise ici du débiteur, comme en droit commun, peut
valablement être déterminée conformément au critère civiliste du « bon
père de famille ». Mais, la doctrine s’accorde plutôt à préciser qu’en
matière bancaire, l’archétype est « fonction de son activité
particulière, de sa compétence, de sa technique … des moyens dont il
dispose ». Plus précisément, ses obligations sont fonctions des données
résultant de la profession même, de telle sorte que la spécificité de
la responsabilité se trouve liée à la spécificité de la faute.
Lors de l’examen des sources du droit bancaire marocain , l’occasion
s’était présentée de souligner le rôle important qu’y occupe l’usage
professionnel. Souvent en l’absence de cadres légaux prévus par le
législateur , celui-ci détermine les obligations qui incombent aux
parties .Ce rôle dévolu à l’usage accentue le caractère professionnel
de la faute , car il est rare que les parties en effectuant une
opération bancaire précisent préalablement et en détail leurs
obligations respectives .Bien plus , les effets recherchés par telle
opération se réalisent sans que soient prévues les démarches
nécessaires pour y aboutir .La doctrine a pu rendre compte de cette
situation de mécanismes bancaires ; situation qui se retrouve
d’ailleurs , de façon générale , en droit commercial et donne à l’usage
la valeur d’une convention tacite .Elle lui confère ainsi une utilité
fondamentale puisque le fait qu’il sert à préciser le contenu des
obligations entraîne une répercussion directe sur la responsabilité du
banquier.
En effet, le manquement à un usage reconnu peut s’analyser comme un
manquement à une obligation de diligence, c’est-à-dire comme une faute
à la charge du banquier qui ne s’est pas comporté comme un
professionnel avisé et agissant dans des conditions similaires .Plus
précisément, la faute professionnelle pouvant entraîner sa
responsabilité contractuelle résulte de son défaut de ne pas agir en «
bon père de famille » dont l’archétype a été décrit précédemment.
Le banquier se doit d’agir en bon père de famille. Dans les opérations
résultant d’un mandat , le banquier doit faire preuve de diligence
.Dans le cadre du mandat dont il a la charge du service rendu , le
banquier assure diverses tâches pour lesquelles il doit agir avec
diligence , prudence et soin : la présentation des valeurs à
l’encaissement dans les délais normaux , la comptabilisation , la
garde…Toute défaillance de la part du banquier mandataire peut être
sanctionnée .Mais quelle est la portée de ce devoir diligence ?



Paragraphe 2 : La portée du devoir de diligence.
Agissant en qualité de mandataire, le banquier doit suivre les
instructions de son client. A titre d’exemple , il ne doit transférer
que le montant désigné par son client , donneur d’ordre , en matière de
virement .Il est également tenu de préserver les valeurs ou titres qui
lui sont confiés en vue de leur encaissement ou garde de toute
détérioration ou perte .
Pour que le mandataire banquier ne voit pas sa responsabilité engagée,
il lui faut agir dans les strictes limites des pouvoirs qui lui sont
donné par le client mandant .Ainsi manque à ses obligations de
mandataire salarié l’établissement bancaire qui malgré l’opposition de
son mandant, cède à un cours de change désavantageux les avoirs en
dollars de son client déposés à l’étranger.
Le cas de force majeure, tel que l’ordre de la loi, ne peut être
invoqué à sa décharge qu’autant que le texte de la loi invoquée
s’applique sans discussion possible .s’il n’en est pas ainsi, le
banquier engage sa responsabilité personnelle en passant outre à
défense de son client .
La banque qui reçoit un ordre d’ouverture de crédit s’institue
mandataire pur et simple de son client et se trouve tenue, sous peine
d’engager sa responsabilité, de respecter strictement les conditions
stipulées par son mandat .
L’article 903 du DOC précise que : « Le mandataire est tenu d’apporter
à la gestion dont il est chargé la diligence d’un homme attentif et
scrupuleux, et il répond du dommage causé au mandant par le défaut de
cette diligence, tel que l’inexécution volontaire de son mandat ou des
instructions spéciales qu’il a reçues, ou l’omission de ce qui est
d’usage dans les affaires. S’il a des raisons graves pour s’écarter de
ces instructions ou de l’usage, il est tenu d’en avertir aussitôt le
mondant et s’il n’y a pas péril en la demeure, d’attendre ses
instructions ».
Ainsi, une banque étant mandataire salariée de son client, a le devoir
strict de l’avertir d’une difficulté rencontrée dans l’accomplissement
de sa mission et de solliciter de sa part des instructions nouvelles
pour sauvegarder sa propre responsabilité. Si elle manque à ce devoir,
elle commet par la même une faute caractérisée dont elle doit rendre
compte à son mandant. La banque est d’autre part responsable vis-à-vis
de son mandant, d’un manque de diligence dans obligations. Mais le
mandant a également le devoir de ne pas rester inactif, et lorsque les
renseignements nécessaires lui ont été fournis par la banque, il est
responsable du retard apporté par lui aux mesures qui pourraient être
de nature à le remplir de son droit.21
Le rôle des banques ne cesse de s’accroître dans le domaine du
recouvrement et du paiement des créances des agents économiques. Suite
à l’étalement de leur réseau , de l’ouverture des succursales et de
leurs relations avec des correspondants étrangers , les banques se sont
dotées de moyens efficaces pour effectuer ces opérations .Devenues un
maillon essentiel dans le processus du mouvement de fonds qui s’opére
plus par jeu d’écritures de compte à compte qu’en espèces , les
entreprises bancaires agissent comme mandataires respectivement , des
créanciers et des débiteurs .Toutefois , dans la mesure où
parallèlement , ils reçoivent aussi des fonds , elles interviennent
également comme dépositoires.
Ainsi, le banquier qui exécute mal une opération de paiement engage sa
responsabilité tout à la fois, à l’égard de son client qui est son
mandat et de celui à qui revient la provision, devenu son créancier
.C’est le cas en matière de tirages de chèques étant donné que la
provision passe d’une personne à une autre .Mieux, dans certains autres
cas (effets domiciliés), le mandant et le titulaire de la provision
peuvent n’être qu’une seule et même personne.
Vis-à-vis du mandant, la responsabilité du banquier est encourue dans
les cas d’exécution défectueuse ou d’inexécution injustifiés. Un
jugement de tribunal de première instance de Casablanca a en effet
décidé que celui-ci doit s’assurer de la conformité de l’ordre de son
client.
Inséparable en droit et en fait des opérations de paiements,
l’intervention du banquier en matière d’encaissements peut également
engager sa responsabilité .Lors de ces opérations le banquier
intervient le plus souvent dans la réception des fonds virés au profit
du client ou dans l’encaissement des effets de commerce.
Apparemment, la réception ou l’exécution d’un ordre de virement au
profit du client ne soulève pas de difficultés, le banquier doit se
conformer aux instructions de celui-ci et à l’usage professionnel
compte tenu des particularités de chaque opération.
En fait, il n’en est rien, ne serait ce que parce que la réception de
l’ordre de virement au profit du client vaut paiement .A ce titre, cet
ordre implique les conséquences juridiques de celui-ci, notamment
l’acceptation du contrat .Le banquier doit donc en tenir compte entant
que tel et en notifier sa réception au client, sous peine d’engager son
entière responsabilité .Comme il a été précité exposons maintenant le
deuxième type de contrat à savoir le contrat de crédit